L’application et l’opposabilité des conditions générales de vente ou d’achat dans des transactions internationales constituent des problèmes récurrents dont l’actualité ne faiblit pas, en dépit des développements des moyens de communication.  La Cour de justice de l’Union européenne a récemment confirmé les règles du jeu sur plusieurs aspects.

Dans les opérations du commerce international, il est habituel que les offres de prix et les bons de commande soient assujettis à un ensemble de règles dont les détails sont établis dans un document annexe.  Tantôt ce document est transmis par l’entreprise concernée, tantôt il y est simplement fait référence via un lien internet renvoyant sur le site de l’entreprise.  Il arrive également fréquemment que les commandes soit passées et acceptées sans un accord exprès et explicite sur les conditions générales de l’une ou l’autre partie.  De la sorte, lorsqu’une question particulière se pose en cours d’exécution de la commande, les règles exactes qui régissent le contrat ne sont pas toujours facilement identifiables.

Une référence écrite suffit, pour autant qu’elle ait lieu avant la conclusion du contrat

La Cour de justice de l’Union européenne s’est prononcée le 8 mars 2018 sur la validité d’une clause attributive de juridiction (c’est-à-dire une clause déterminant à l’avance les cours et tribunaux auxquels les différends éventuels devraient être soumis) figurant dans les conditions générales d’une entreprise. 

Selon la Cour, une telle clause est valable lorsque les parties signent toutes les deux un contrat faisant expressément référence aux conditions générales dans lesquelles figure la clause en question.  En revanche, à défaut de contrat signé par les deux parties, le fait que les conditions générales figurent au verso ou soient jointes à des factures ne suffit pas à rendre la clause attributive de juridiction applicable, même si ces factures ont été payées.  Le fait que les conditions générales soient reproduites au dos d’une facture ne signifie pas que le destinataire de cette facture aurait marqué son accord sur celles-ci : les conditions générales auraient dû être communiquées plus tôt, avant la conclusion du contrat.

Cette position doit être rapprochée d’un jugement rendu par le tribunal du Brabant-Est des Pays-Bas le 28 février 2018. 

Cette deuxième affaire était également relative à une vente internationale de marchandises.  Dans ce type de ventes (soumises à la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises), les conditions générales font partie contrat à condition que l’autre entreprise ait eu la possibilité d’en prendre connaissance.  L’existence de cette possibilité doit être appréciée de manière raisonnable.  Ainsi, lorsqu’un contrat est conclu par la voie d’un échange de courriels, il suffit que les conditions générales soient consultables électroniquement, par exemple via un lien internet.

Et si les conditions générales ne peuvent être comprises ?

 

Les conditions générales ne doivent pas obligatoirement être rédigées dans la même langue que le contrat : il suffit qu’elles soient disponibles dans une langue dont on peut raisonnablement considérer qu’elle est comprise par l’autre entreprise. 

Dans l’affaire soumise au tribunal du Brabant-Est des Pays-Bas, les conditions générales du vendeur étaient en néerlandais et la société acheteuse était une société de droit anglais.  Le tribunal a néanmoins considéré que les conditions générales étaient applicables au motif qu’un des administrateurs de la société anglaise, qui avait traité avec le vendeur, était de nationalité néerlandaise.

Dans les transactions internationales, les conditions générales d’une entreprise doivent être communiquées dès les premières discussions précontractuelles.  Les références faites aux conditions générales une fois le contrat conclu ne sont en principe pas suffisantes pour permettre leur application et leur opposabilité.

 

Gautier MATRAY, Avocat - Matray, Matray & Hallet, Liège, Bruxelles, Anvers, Cologne, et Paris (décembre 2018)

 

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