En ces temps de pandémie où les déplacements et les rassemblements sont rendus beaucoup plus compliqués, les services électroniques revêtent une importance primordiale. Témoin de ce besoin accru, la valeur de l’action de la société Zoom, société spécialisée dans les vidéoconférences, a ainsi triplé entre le 17 mars et le 11 septembre 2020. Pendant la même période, l’action de Microsoft a augmenté de 50 %. Les services électroniques ne sont pas limités par des contraintes géographiques. S’ils sont disponibles dans un pays, ils peuvent en théorie être facilement étendus vers tous les pays de l’Union européenne et du reste du monde. Au niveau européen, la question peut se poser de savoir comment respecter l’ensemble des législations des pays dans lesquels le service électronique est fourni. La problématique peut sembler relever du casse-tête mais il existe heureusement des règles destinées à faciliter les choses.

 

Une entreprise qui souhaite s’établir dans un autre pays de l’Union européenne doit en principe respecter la législation applicable dans ce pays. Elle ne peut toutefois pas se voir imposer des règles plus strictes ou des conditions moins favorables au seul motif qu’elle serait une entreprise étrangère.

La nécessaire flexibilité octroyée aux services électroniques

En matière de prestations de services électroniques, la règle est inversée. Pour autant que l’entreprise respecte les règles applicables dans le pays où elle est établie, elle peut en principe librement offrir ses services électroniques dans les autres pays de l’Union européenne. Les législations des autres pays ne peuvent pas soumettre l’activité de l’entreprise étrangère à un régime d'autorisation préalable ou à d’autres exigences d’effet équivalent.

On s’en doute, le principe ne peut pas être absolu. Une série d’exceptions existent. Le principe du respect de la législation du pays d’origine ne s’applique pas, par exemple, aux services qui supposent l’intervention de professionnels, comme les notaires et les avocats. De même, des règles contraignantes peuvent être édictées au niveau national dans les domaines qui touchent à la santé publique, la protection du consommateur, ou la protection des investisseurs. La libre prestation des services électroniques peut donc céder le pas face à des intérêts supérieurs. Enfin, les services qui sont déjà fortement réglementés, comme les services financiers ou les services de transport, par exemple, ne peuvent pas échapper à ces réglementations uniquement parce que le service serait proposé entièrement de manière électronique.

Une liberté que les plus petites entreprises comme les plus grandes peuvent mettre en œuvre

C’est ce qui explique par exemple que Uber doit respecter la législation nationale de chaque pays dans lequel elle offre ses services, tandis que Airbnb peut offrir ses services depuis l’Irlande sans devoir respecter les réglementations nationales sur les locations de courte durée.

Même si une partie importante du service est gérée électroniquement, les services fournis par Uber sont constitutifs d’un service de transport physique et ils ne peuvent donc pas bénéficier du régime favorable applicable aux services électroniques. Uber choisit les chauffeurs et les voitures. Uber fixe le montant à payer pour les courses. Les passagers ne paient pas directement le chauffeur : le paiement est fait directement à Uber. Il n’y a pas de relation juridique qui se noue entre le passager et le chauffeur. De son côté, Airbnb se limite à mettre en relation un propriétaire et un locataire en vue de la location d’un bien immobilier grâce à sa plateforme électronique. Airbnb n’intervient pas dans la transaction physique et ne fixe pas non plus le montant de la location. Le service reste entièrement électronique.

A l’heure où la tendance est à toujours plus de règles et à l’adoption continuelle de nouvelles législations, la liberté qu’a une entreprise de fournir ses services électroniques dans différents pays de l’Union européenne en se conformant uniquement à sa propre législation nationale peut constituer une véritable aubaine.

Gautier Matray – Matray, Matray & Hallet, société d'avocats, Liège, Bruxelles, Anvers, Cologne, et Paris. (septembre 2020)

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