Beaucoup de conditions générales prévoient systématiquement une clause de réserve de propriété dans le but de protéger le vendeur contre les défauts de paiement. Ce mécanisme fait en sorte que l’exportateur reste propriétaire de la chose vendue jusqu’à ce que le prix soit intégralement payé. Les parties perdent parfois de vue que, dans un contexte international, ce mécanisme de protection n’offre pas toujours le niveau de sécurité attendu.

C’est une erreur fréquente de croire que la propriété d’une chose est transmise après le paiement du prix de vente. Dans beaucoup de droits nationaux, la propriété est transférée dès le moment où le contrat est conclu.

Pour éviter un transfert de propriété immédiat, il est d’usage de prévoir par contrat une réserve de propriété et d’inclure une clause de ce genre dans les conditions générales. Le vendeur conserve de cette manière la propriété de la chose qu’il a livrée jusqu’au moment où l’acheteur paie le prix de vente convenu dans sa totalité. Ce mécanisme n’offre pas seulement une protection contre les défauts de paiement, il peut également jouer en cas de faillite d’un acheteur et permettre au vendeur de récupérer les biens impayés.

Cette clause offre-t-elle le même degré de protection vis-à-vis des débiteurs étrangers?

Dans les opérations de vente internationales, c’est souvent le droit du pays dans lequel la chose vendue se trouve qui sera d’application pour régler les questions relatives à la propriété de cette chose. Cet aspect a une grande influence sur l’efficacité de la garantie contractuelle. La portée, les modalités, et dans certains cas même, la reconnaissance de la réserve de propriété varient d’un pays à l’autre. 

Des solutions qui dépendent du droit national 

Le droit néerlandais permet, par exemple, au vendeur qui a pris soin de prévoir une clause de réserve de propriété de récupérer les biens livrés chez l’acheteur. En outre, ce système juridique connaît un régime de réserve de propriété développé qui englobe aussi bien les choses payées que les choses impayées qui sont encore identifiables chez l’acheteur. Cela entraîne la disparition de l’obligation (parfois très délicate) de prouver quels sont les biens en particulier qui ont été payés et quels sont ceux qui ne l’ont pas été.

En France, il est nécessaire que la réserve de propriété soit passée par écrit, au plus tard au moment de la livraison. Il est recommandé de rappeler l’existence de la clause de réserve de propriété sur la facture en caractères gras. En cas de procédure de faillite, les biens peuvent être récupérés chez l’acheteur, mais cela doit se produire dans les trois mois du prononcé de la faillite.

Dans beaucoup de pays, comme par exemple en Espagne, au Brésil et aux États-Unis, il existe également une obligation de faire enregistrer la clause de réserve de propriété. À défaut, la clause ne peut pas recevoir d’effet. Et malgré la tendance en faveur d’une reconnaissance plus forte de la réserve de propriété, il existe encore beaucoup de pays dans lesquels le régime est loin d’être prévisible. C’est notamment le cas dans plusieurs pays de l’ancien bloc soviétique. Les exportateurs qui vendent vers ces pays sont invités à faire preuve d’une vigilance accrue.

L’insertion de clauses de réserve de propriété dans un contexte international est souvent une bonne idée, mais on aurait tort de croire que ces clauses pourront toujours produire leur plein effet. Afin de pouvoir bénéficier des avantages liés à la réserve de propriété, il est préférable de vérifier la conformité de la clause avec le droit dans lequel les exportations seront réalisées.

Ségolène GEERAERT et Gautier MATRAY, Avocats - MATRAY, MATRAY & HALLET, société civile d'avocats, Liège, Bruxelles, Anvers, Cologne, et Paris

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