Cadre juridique
La levée des sanctions envers l'Iran
Le compromis de Vienne du 14 juillet 2015 est le fruit de deux ans de négociations entre le groupeE3+3
(Allemagne, France, Royaume-Uni + Chine, États-Unis, Russie) et l'Iran, sous l'égide de l'Union européenne. L'accord garantit le caractère civil du nucléaire iranien et doit empêcher que Téhéran ne se dote d'une bombe atomique, en échange d'une levée des sanctions.
L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) a validé, le 16 janvier 2016, la mise en œuvre de cet accord sur le nucléaire iranien. Grâce à des inspections sur place, elle estime pouvoir affirmer que Téhéran respecte les engagements pris à l’été dernier. Les sanctions adoptées à l’encontre de la République islamique d’Iran par l’ONU, les Etats-Unis et l’Union européenne seront donc progressivement levées.
Notons, d’autre part, que certains régimes de sanctions qui touchent l’Iran mais sans lien avec son programme nucléaire (comme par exemple les sanctions UE liées à la violation des droits de l’homme ou les sanctions US liées au terrorisme) ne sont pas concernées par le JCPOA et restent donc d’application.
http://eeas.europa.eu/top_stories/2015/150714_iran_nuclear_deal_en.htm
Mesure de contrôle à l'encontre de l'Iran
Les sanctions américaines
Les Etats-Unis s’étaient engagés à lever les sanctions dites secondaires, qui visent les opérateurs économiques étrangers, dans les mêmes secteurs que ceux correspondant à l’allègement des sanctions européennes (secteur financier–banques et assurances, secteur de l’énergie–pétrole, gaz, pétrochimie, transport, construction navale et port, or et métaux précieux), ainsi que dans le secteur automobile.
L’Administration Trump a décidé le 8 mai dernier de se retirer de l’accord nucléaire qui avait été âprement négocié en 2015 par l’Iran, les USA, la GB, la France, l’Allemagne, la Russie, la Chine et l’Union Européenne.
Suite à cette décision, les sociétés wallonnes présentes sur le marché américain pourraient s’exposer à des sanctions sur le sol américain. Les modalités définitives de ces sanctions ne sont pas encore connues mais le Trésor américain, via l’Office of Foreign Assets Control (OFAC) a publié un document ( FAQs) le 8 mai donnant un bon aperçu du régime de sanctions à venir.
https://www.treasury.gov/resource-center/sanctions/Programs/Pages/iran.aspx
Si ces sanctions ne seront d’application que, selon les secteurs concernés, après soit le 6 aout 2018 soit le 4 novembre 2018, l’OFAC exige déjà que les sociétés réduisent leur exposition sur le marché iranien pendant ces périodes de transition qui courent donc du 8 mai au 6 aout ou du 8 mai au 4 novembre 2018.
Application des sanctions à daté du 6 août 2018 :
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Sanctions on the purchase or acquisition of U.S. dollar banknotes by the Government of Iran;
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Sanctions on Iran’s trade in gold or precious metals;
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Sanctions on the direct or indirect sale, supply, or transfer to or from Iran of graphite, raw, or semi- finished metals such as aluminum and steel, coal, and software for integrating industrial processes;
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Sanctions on significant transactions related to the purchase or sale of Iranian rials, or the maintenance of significant funds or accounts outside the territory of Iran denominated in the Iranian rial;
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Sanctions on the purchase, subscription to, or facilitation of the issuance of Iranian sovereign debt; and
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Sanctions on Iran’s automotive sector.
Application des sanctions à daté du 4 novembre 2018 :
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Sanctions on Iran’s port operators, and shipping and shipbuilding sectors, including on the Islamic Republic of Iran Shipping Lines (IRISL), South Shipping Line Iran, or their affiliates;
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Sanctions on petroleum-related transactions with, among others, the National Iranian Oil Company (NIOC), Naftiran Intertrade Company (NICO), and National Iranian Tanker Company (NITC), including the purchase of petroleum, petroleum products, or petrochemical products from Iran; Issued on May 8, 2018
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Sanctions on transactions by foreign financial institutions with the Central Bank of Iran and designated iranian financial institutions under Section 1245 of the National Defense Authorization Act for Fiscal Year 2012 (NDAA);
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Sanctions on the provision of specialized financial messaging services to the Central Bank of Iran and Iranian financial institutions described in Section 104(c)(2)(E)(ii) of the Comprehensive Iran Sanctions and Divestment Act of 2010 (CISADA);
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Sanctions on the provision of underwriting services, insurance, or reinsurance; and
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Sanctions on Iran’s energy sector.
In addition, effective November 5, 2018, the U.S. government will revoke the authorization for U.S.-owned or -controlled foreign entities to wind down certain activities with the Government of Iran or persons subject to the jurisdiction of the Government of Iran that were previously authorized pursuant to General License H. (See FAQ 4.4. below).
Furthermore, no later than November 5, 2018, the U.S. government will re-impose, as appropriate, the sanctions that applied to persons removed from the List of Specially Designated Nationals and Blocked Persons (SDN List) and/or other lists maintained by the U.S. government on January 16, 2016.
Persons engaging in the activity listed above undertaken pursuant to the U.S. sanctions relief provided for in the JCPOA should take the steps necessary to wind down those activities by November 4, 2018, to avoid exposure to sanctions or an enforcement action under U.S. law. (See FAQ 2.1. below for a description of activities that would not be prohibited or sanctionable during the wind-down period.) [05-08-2018]
Les cas de figure sont exposés dans la présentation Doing Business Despite the Sanctions Against Iran ci-jointe du bureau d’avocats français Cohen Amir-Aslani. Affilié au barreau de Paris, ce bureau dispose d’une équipe franco-iranienne à Téhéran.
Doing Business Despite the Sanctions Against Iran
http://www.cohenamiraslani.com/
Retenons, à titre d’exemple, que les importations d’hydrocarbures iraniens seront interdites à partir du 4 novembre. Pour le secteur automobile, les sanctions seront effectives dès le 6 aout, ce qui explique le départ en trombe du Groupe PSA. Renault semble, lui, faire de la résistance (cf les déclarations de son CE0 le vendredi 15 juin). Leur stratégie concernant le marché américain différencie ces deux groupes français.
Sur une note plus positive, il existe dans la législation américaine des exceptions aux mesures d’embargo. Y est consacrée, notamment, l’exemption pour raisons humanitaires. La santé (équipements médicaux, pharma) et l’agroalimentaire devraient continuer à jouir de cette exemption même s’il faut encore attendre la confirmation de l’Administration américaine.
A noter aussi qu’une demande commune d’exemption pour certains secteurs a été demandée par les pays européens le 6 juin dernier, notamment pour les messageries financières (comprendre SWIFT).
Enfin, il faut savoir qu’au-delà du médical/santé et de l’alimentaire dont l’exemption formelle devrait être prononcée, ils existent de nombreux autres secteurs non-soumis formellement aux sanctions américaines.
Nous conseillons donc à nos exportateurs exposés aux Etats-Unis de se faire correctement conseiller par un bureau d’avocat afin de s’assurer que leur secteur n’est pas soumis à sanction.
L’OFAC (Office of Foreign Assets Contrôle du département du Trésor américain) a publié des documents explicatifs relatifs à la levée des sanctions américaines sur l’Iran au titre de l’accord de Vienne: Iran sanctions
Attitude de l'Europe
A noter que malgré la décision américaine, les sanctions européennes qui avaient été levées en janvier 2016 le sont toujours. En respectant certaines conditions (double usage, liste des personnes avec lesquelles il est interdit de commercer (blacklist), il n’est donc pas illégal de commercer avec l’Iran selon les droit européen et belge.
D’autre part, suite à la décision des USA de se retirer du plan d’action global commun avec l’Iran et de réactiver les sanctions contre l’Iran, 2 actes délégués ont été adoptés par la Commission visant à protéger les intérêts des entreprises qui investissent en Iran. L’un porte sur le « statut de blocage », l’autre sur l’extension du mandat de prêts extérieurs de la BEI.
Statut de blocage
Certaines des mesures que les USA réactiveront contre l’Iran ont des effets extraterritoriaux et, dans la mesure où elles portent atteinte aux intérêts des personnes physiques et morales établies dans l’UE qui effectuent des opérations de commerce et/ou des mouvements de capitaux et des activités commerciales connexes entre l’UE et l’Iran, elles violent le droit international et empêchent la réalisation des objectifs de l’UE.
Dans l’UE, les mesures extraterritoriales sont soumises au règlement (CE) 2271/96 du Conseil, qui a été adopté en réponse à l’adoption par les USA de mesures restrictives concernant Cuba, la Libye et l’Iran, lesquelles ont eu des incidences négatives sur les intérêts des personnes physiques et morales dans l’UE exerçant des activités commerciales avec ces pays qui étaient légitimes en vertu du droit communautaire européen. Le règlement reconnaît que, par leur application extraterritoriale, ces instruments violent le droit international.
À la suite du Sommet de Sofia le 16 mai dernier, la Commission a lancé le processus visant à ajouter au règlement (CE) nº 2271/96 du Conseil les mesures extraterritoriales que les USA vont imposer contre l’Iran.
Garantie BEI
Le 14 septembre 2016, la Commission a proposé des modifications à apporter à la décision existante relative au mandat de prêt extérieur dans plusieurs domaines. L’ajout de l’Iran à la liste des pays potentiellement éligibles figurait parmi les modifications proposées. La décision modifiant la décision relative au mandat de prêt extérieur a finalement été adoptée par le Parlement européen et le Conseil en mars 2018 et est entrée en vigueur en avril 2018 [décision (UE) 2018/412]. L’inscription de l’Iran sur la liste des pays potentiellement éligibles habilite la Commission à adopter un acte délégué pour rendre l’Iran éligible au bénéfice du mandat de prêt extérieur, en ajoutant ce pays à la liste des pays éligibles.
Après avoir évalué la situation économique, sociale, environnementale et politique générale de l’Iran avec le concours du SEAE, la Commission considère qu’il y a lieu d’ajouter ce pays à l'annexe III de la décision nº 466/2014/UE, qui dresse la liste des régions et pays éligibles à un financement de la Banque européenne d’investissement couvert par la garantie de l'Union.
Toutefois, en ce qui concerne l’extension de la garantie de la BEI à l’Iran, plusieurs questions ont été soulevées sur les conséquences de cette proposition (et des risques d’effets non désirés que cela pourrait avoir sur la BEI et les entreprises):
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1/3 des fonds de la Bei sont en dollars US;
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Il existe des risques pour le refinancement de la BEI et il ne faut pas négliger les réactions des agences de notation;
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La capacité de la Bei de poursuivre sa collaboration avec d’autres institutions financières internationales (Banque mondiale, Société financière internationale, BERD) peut être influencée;
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Tout cela dans le contexte du BREXIT où des fonds doivent être trouvés pour répondre au retrait de UK.
Sur ce point la position BE n’a pas été arrêtée. Une réunion de coordination étant prévue ce lundi 25 juin.
Le système bancaire
Peu de banques belges travaillent avec l’Iran. Certaines d’entre-elles, au cas par cas et pour leurs clients uniquement, peuvent effectuer des transactions financières avec l’Iran. Il s’agit donc de contacter votre banquier si vous désirez recevoir des paiements depuis une banque iranienne. D’après nos informations, BNP et ING refuseraient de travailler avec l’Iran.
Cette difficulté lié au système bancaire pourrait s’aggraver si le système SWIFT devait être interrompu avec l’Iran, comme cela est prévu le 4 novembre.
Pour les entreprises wallonnes qui ne sont pas exposées sur le marché US, les relations bancaires compliquées avec l’Iran constituent la difficulté première.
CREDENDO ne couvre plus le risque pays pour l’Iran : D’après nos informations, l’assureur a suspendu ses couvertures sur l’Iran. Il ne serait donc actuellement plus possible de se faire payer via des lettres de crédit et ou d’offrir du financement à long terme à ses partenaires iraniens via des banques belges ou européennes.
Voici une communication que nous avons reçue de leur part :
« Due to the decision by the US to step out of the nuclear agreement, Credendo has decided to stop coverage for Short Term transactions and is thus off-cover for non-payment and non-transfer risk. For medium long term transactions coverage has been suspended, given that we are further assessing the situation. Both the short term and the medium long term political risk classification have been downgraded to category 7. »
Credendo réévalue constamment la situation.
Systèmes de paiement alternatifs : Sachez également que les entreprises iraniennes ont mis en place des systèmes de paiement alternatifs via des pays tiers comme la Turquie, la Géorgie et les Emirats Arabes Unis ou même parfois depuis l’Union européenne. Ces systèmes sont bien rôdés mais nous vous encourageons à toujours bien rester attentifs sur la légalité de ces opérations afin de ne pas être impliqués dans des opérations de blanchiment d’argent ou toutes autres activités illégales. Il est toujours préférable d’accepter un paiement en provenance d’une filiale iranienne dans un pays tiers que du compte en banque d’une personne physique. De plus, les banques européennes n’accepteront pas d’argent si la provenance n’est pas clairement définie surtout lorsque les opérations concernent des exportations vers l’Iran.