Les Incoterms édictés par la Chambre de Commerce Internationale (CCI) constituent une législation rigoureuse qui n’est pas sujette à interprétation, mais offre une sécurité juridique de portée mondiale pour le vendeur et l’acheteur s’ils s’y sont référés dans le contrat. 

Il a toujours été recommandé de bien les maîtriser afin de bien connaître les coûts et les risques à supporter par chacune des parties.

La crise actuelle impose de bien comprendre les dessous des Incoterms qui ont été rarement mis en lumière car chacun partait du principe depuis plus de 25 ans que les frontières, les formalités, la fréquence et l’intensité des moyens de transport servaient et s’adaptaient à la mondialisation de l’économie.

La régularité des flux était une certitude que peu envisageait de voir remise en cause.

Trois mois ont suffi à balayer les certitudes établies et les entreprises n’ont encore que peu pris en compte les conséquences à court et moyen terme de cette crise sanitaire et économique.

Quel rapport avec les Incoterms ?

Il y a une notion dans les Incoterms de la CCI de « Vente au départ » ou de « Vente à l’arrivée ».

Les Incoterms concernés par la « Vente au départ » sont ceux des familles :

  • E – EXW qui prévoit que la marchandise est mise à disposition de l’acheteur emballée mais non chargée et non dédouanée à l’exportation ;
  • F – FCA entrepôt fournisseur ou transporteur de l’acheteur, FAS ou FOB qui prévoient le chargement du moyen de transport de l’acheteur dans l’entrepôt du fournisseur (FCA) ou le rapprochement de la marchandise au transporteur de l’acheteur (FCA) ou sa mise à disposition le long du navire au port de départ (FAS) ou à bord du navire en bon état (FOB) ;
  • C – CFR / CIF / CPT / CIP qui mettent à charge du vendeur le transport jusqu’au lieu de destination convenu avec le client mais le décharge des risques après la mise à bord du navire au port (CFR/CIF) ou la remise au premier transporteur (CPT/CIP).

Les incoterms concernés par la « Vente à l’arrivée » sont ceux de la famille :

  • D – DPU au terminal (port/aéroport) d’arrivée / DAP/DPU/DDP au lieu d’arrivée qui mettent à charge du vendeur les frais et les risques jusqu’au lieu d’arrivée convenu avec le client.

En quoi la crise du COVID a-t-elle des conséquences pour un vendeur selon les INCOTERMS ?

Dans les Incoterms des familles E et F, l’acheteur doit organiser le transport depuis le pays du vendeur alors que dans la famille C, c’est le vendeur qui doit organiser le transport jusque dans le pays de l’acheteur sans encourir les risques.

Dans la famille des D, le vendeur est tenu de livrer à l’arrivée dans le délai contractuel en supportant les frais et risques prévu par l’Incoterm

En transport routier dans l’UE, il a été prévu dès la fermeture des frontières intérieures que les camions pourraient continuer à les franchir sans formalités additionnelles => à condition que le client ne soit pas affecté dans son fonctionnement par les conséquences du COVID, il n’y a donc pas de changement.

Hors UE, le transport routier peut être affecté par des problèmes « imprévisibles » et de toute façon des problématiques de dédouanement à l’importation => la circulation hors EEE (Espace Economique Européen qui regroupe l’UE27 + le Royaume-Uni jusqu’au 31/12/2020 + la Suisse et la Norvège) est affectée en terme de prix et de fréquence.

Le transport maritime est fortement impacté par l’absence de fret au départ de la Chine jusqu’au mois de mars du fait de la fermeture des fournisseurs chinois qui a totalement déstabilisé le marché (les navires sont habituellement chargés de conteneurs à destination de l’Europe ou des Etats-Unis et retourne vers l’Asie avec un faible volume de marchandises) car les transporteurs maritimes n’arrivent plus à couvrir leurs frais, ce qui engendre des suppressions de navires.

Le transport aérien est impacté de deux façons :

  • les lignes régulières transportant des passagers ont été supprimées et donc de ce fait la marchandise qui était habituellement expédiée de cette façon ne peut l’être => disparition de possibilités de transport aérien vers les aéroports à travers le monde ;
  • les lignes transportant uniquement des marchandises (full cargo) se retrouvent avec un volume de marchandises énormes et urgentes (matériels sanitaires), ce qui pousse les prix vers le haut et perturbe la régularité de la majorité des acheminements.

Pour l’entreprise qui vend à l’international, il est donc essentiel au moment de mettre en production d’être sûr que l’expédition pourra être réalisée comme prévu contractuellement.

Si ce n’est pas possible, il conviendra d’amender le contrat en termes de prix ou de conditions de livraison afin de ne pas être en défaut d’exécution des obligations contractuelles.

Tout le monde peut comprendre que la sécurité et la santé sont un aspect prioritaire, mais dans la majorité des cas, la force majeure ne pourra que difficilement être invoquée au départ de nos pays car il n’y a que peu de restrictions à l’exportation et l’influence majeure réside dans les coûts qui s’envolent pour le vendeur si le contrat a été signé avec un Incoterm « C ».

Il en est tout autrement pour les Incoterms de la famille « D » où le vendeur a l’obligation de livrer la marchandise dans le pays du client en supportant tous les risques donc y compris les fermetures de frontières, ports ou aéroports, mais aussi de se conformer aux règlementations d’importation qui peuvent l’obliger à fournir des documents ou supporter des frais d’attente importants pour les dédouanements à l’importation.

Vincent REPAY - Conseiller en Commerce extérieur(avril 2020)

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