AWEX : Bonjour Arnaud. Depuis combien de temps travaillez-vous avec les EAU ?

Arnaud Meulemeester (AM) : Bonjour la team. Nous avons commencé très tôt à travailler hors de la Belgique car notre pays est un trop petit marché sur le moyen terme pour nous. Nous nous sommes fait connaître avec notre technologie de mapping 3D. Le projet qui nous a fait connaître était un show organisé dans la cité interdite à Pekin. Puis de là, nous nous sommes fait connaître dans le monde entier, notamment avec la société franco-italienne Ruggieri, leader mondial de la pyrotechnie depuis... 1739 ! Ce sont eux qui nous ont demandé de leur proposer un show à projeter sur le Burj-Khalifa (la plus haute tour du monde, NDLR) lors du Nouvel an 2015 à Dubai. Ce fut notre premier gros projet au Moyen-Orient. Ils ont tellement apprécié le show qu’il est depuis devenu permanent à Dubai. Ça nous a ouvert toutes les portes au MO.

AWEX : Ce projet vous a permis de vous faire connaître et de prospecter dans la région ?

AM : Nous faire connaître, oui, définitivement. Mais nous n’avons jamais réellement eu besoin de faire de prospection. Ici tout fonctionne beaucoup plus au relationnel, au bouche-à-oreille. Aujourd’hui la plupart de nos clients sont basés à Dubai, mais ils travaillent en général dans tous les pays du Moyen-Orient. Dubai est pour nous une bonne base de départ pour rayonner dans tout le Golfe (Qatar, Koweit…).

AWEX : Les Emirats, est-ce un marché compliqué à aborder ? Que faut-il absolument prendre en compte ?

AM : C’est un marché qui a ses particularités, comme tous les marchés du monde, mais pas particulièrement compliqué. C’est une économie très ouverte, très internationalisée. En réalité, nous travaillons rarement en direct avec des acteurs locaux. Nous collaborons essentiellement avec des boîtes belges, européennes… qui sont basées à Dubai et qui traitent directement avec les acteurs économiques ou politiques locaux.

Après il est évident que culturellement, il faudra toujours savoir s’adapter. Nous sommes dans des pays très mondialisés, globalisés, mais il ne faut pas perdre de vue que nous restons dans des pays arabes, avec des partenaires et des décideurs qui ont leur propre culture. Il faut savoir respecter cela, ne pas l’oublier.

AWEX : Pourrais-tu nous donner un exemple de difficultés ou de challenges particuliers que vous avez rencontré sur les EAU ?

AM : Je dirai sans hésiter, la notion du temps. Tout se décide tard et s’exécute très vite, sur des échelles que nous considèrerions ici comme du last minute. Voici un très bel exemple : On nous demande de réaliser un grand show pour la fête nationale saoudienne… 2 semaines avant l’événement ! Je me souviens encore, nous avons eu fini le projet un jeudi matin et qu'un de nos collaborateurs a sauté dans un avion pour Riyad avec le disque dur. Il est arrivé le vendredi matin, escorté de l’aéroport au lieu de l’événement par l’armée pour que tout soit finalisé en temps et en heure. Au final, il a terminé le paramétrage de la projection au moment où les autorités locales faisaient leur entrée dans le stade. Bref, quand je vous dis last minute…

Après c’est un exemple extrême, ce n’est évidemment pas toujours comme ça. Mais il y a des éléments de notre métier auxquels nous devons être particulièrement attentifs. Par exemple nous devons faire attention quand nous projetons des visages, que ceux-ci ne soient pas ‘coupés’ par des fenêtres ou des éléments de façade. En Europe ça pourrait être pris pour de la maladresse, voire même pas pris en considération, au Moyen-Orient c’est considéré comme réellement insultant. Alors imaginez si ça arrive lors d’une représentation royale… c’est la fin de votre aventure moyen-orientale (rires).

AWEX : Y a-t-il beaucoup de concurrence sur le marché Emiratis ?

AM : Oui. Il y a beaucoup de potentiel, mais aussi beaucoup de concurrence. J’irai même jusqu’à dire que tellement a déjà été fait que ce n’est plus l’eldorado d’il y a 10 ans. Le marché est beaucoup plus mature et les autorités locales souhaitent à présent pousser les entreprises émiraties. Du coup ça devient plus compliqué pour les entreprises internationales de se développer. Elles doivent à présent de plus en plus passer par des sociétés locales pour continuer leur business.

Aujourd’hui, le pays qui a le plus de potentiel, le plus attrayant, c’est l’Arabie Saoudite. Ce pays est en plein développement et il y a une course au gigantisme, tous secteurs confondus, entre les différents états voisins. Chacun veut faire plus beau et plus grand. Pour notre secteur, c’est évidemment une bonne nouvelle.

Si je peux donner un conseil : Misez tout sur la qualité de vos produits et services. Vous devez proposer le meilleur. Ne pensez surtout pas que, parce que ce sont des économies relativement récentes, ou que parce que les traditions locales sont encore fortement ancrées dans les relations professionnelles, ces pays se contentent de peu ou sont plus vite satisfaits. Nous avons vu trop souvent des boîtes actives dans l’entertainement sous-estimer les attentes locales, et in fine, ça n’a pas marché.

AWEX : Quel a été le soutien de l’AWEX dans votre développement régional ?

AM : Nous avons reçu beaucoup d’informations et d’études de la part de l’AWEX en Belgique et des équipes locales de Dubai. Ces dernières sont vraiment nos yeux et nos oreilles sur le terrain. En plus elles nous apportent de bonnes connections et nous aident à nous insérer dans les réseaux locaux et ça c’est vraiment pratique car on ne peut pas se permettre d’être partout à la fois.

AWEX : Quels sont vos projets futurs à Dubai ?

AM : Nous avons travaillé sur le pavillon de l’Arabie Saoudite à l’Expo Dubai 2020. Nous allons faire la cérémonie d’ouverture des Gulf Sport Games (jeux olympiques locaux) au Koweit, durant laquelle nous allons battre le record du nombre de drones en vols dans une cérémonie indoor. Et puis nous avons encore une série de projets pour les années à venir, mais ça je ne peux pas encore vous en parler… Surprise !